La grève des mots- Gilbert (vendredi)

LA GRèVE DES MOTS

 

Ça a commencé par un murmure, un bruissement, voire un babillage chuchoté.

On ne distinguait pas trop les mots, pas vraiment les phrases, seulement un borborygme.

Manif ? Oui mais qui ? pourquoi ?

J’ai fini par distinguer

          Les mots en colère

          Apophtegmes avec nous

          Axiomes on vous suit

Allez, les petits mots devant.

Grands mals derrière.

J’ai compris que les mots étaient en colère et qu’ils voulaient se mettre en grève.

 

           Chut

           Silence

Voire mieux

 

Syntagme ne voulait plus s’exprimer,

Aphorisme ne disait rien,

Circonlocution, habituellement prolixe, me regardait de haut,

Devant mon air interloqué, un adage syndiqué se disait syndigné

La manif faisait du bruit, un vacarme silencieux à réveiller les morts.

Une boutade ne voulait plus sortir.

Le mot jaune, briseur de grève faisait la grève de la grève.

          Bavardages avec nous

          Discours au balcon

 

Mais quelles étaient leurs revendications ?

 

Simplement le droit à la fluidité,

Le droit de ne pas être interrompu,

Le droit d’être plus fort que tout le monde

Le droit d’exister.

 

MERDE alors !

 

Les Gros MOTS avec nous…

 

Alors les injures se sont mises à voler bas :

Insultes, sarcasmes, affronts, offenses, invectives, engueulades….

 

Puis un mot a élevé sa grosse voix :

 

SUFFIT !

 

DISPERSION !

 

Tout le monde s’était tu

 

Partageons nos mots et faisons une manifestation écrite.

 

 

A VOS PLUMES